Comment apprhender les ralits criminelles ? Pour les contemporains qui y sont confronts comme pour les historiens qui s'efforcent de les restituer, ce n'est qu'au travers de l'enqute judiciaire que le crime devient peu peu matrisable, qu'il advient comme ralit sociale. Mais l'opration n'est ni mcanique, ni homogne : elle convoque des acteurs, des pratiques et des imaginaires diffrents. Elle constitue au XIXe sicle un enjeu majeur de l'ordre social et un outil de sa reproduction. La conjoncture politique, les conflits de classe et les prjugs psent sur son droulement. L'investigation " scientifique " est marginale et, en dpit de la mfiance qu'il suscite, c'est le tmoignage qui gouverne l'enqute, avec ses mensonges, ses approximations, ses intimidations et ses rglements de comptes. Et ce sont l'aveu et la dnonciation qui sont plbiscits par des services de police dont la puissance s'affirme tout au long du sicle. Quel est le rle vritable de la culture indiciaire, probatoire, technique, promue par la modernit judiciaire qui se veut rationnelle et scientifique et voudrait que l'enqute soit une mcanique judiciaire ? Des "progrs", sans doute, sont indniables. Les procdures s'amliorent, le nombre des actes d'enqute augmente, les outils se perfectionnent : plans, relevs techniques, photographies se multiplient. Certains parlent de triomphe de la police technique au dbut du XXe sicle ; mais ces pratiques se limitent un type trs particulier de crimes ou d'affaires retentissantes. Ce livre claire le fonctionnement des enqutes dans l'Europe du XIXe sicle, cens tre celui des " progrs " de la rationalit judiciaire. |