L'image de la smiotique franaise s'est fige, partir des annes 1960, comme celle d'une discipline formelle travaillant par principe sur des artefacts spars de la vie. Textes extraits de leur contexte, sujets exclus de leur histoire, objets vids de leur substance, effets de sens sans prsence... Pourtant, cinquante ans ont pass et la discipline offre aujourd'hui un autre visage. C'est ce dont voudrait tmoigner ce livre. Loin de pratiquer l'exclusion par principe, il s'agit dsormais de retrouver les dimensions perdues du sens, celles qui dpendent de la prsence mme - immdiate, prouve - de l'autre, des textes, des ?uvres, de la matire sensible. Et par l, de tirer de l'ineffable mille petites " passions " vcues dans l'instant, au contact des choses, mais souvent si tnues que la langue les a laisses sans nom. Est-il donc possible de rendre compte de l'exprience, comprise comme moment de l'mergence du sens, tout en restant dans le cadre d'une qute d'intelligibilit raisonne et communicable Parier pour une rponse affirmative, c'est revenir aux origines phnomnologiques de la smiotique. Cette vise prend appui sur le dernier livre de A.J. Greimas, De l'Imperfection, autour du concept clef d'esthsie, sans toutefois en retenir l'ide de " fusion " entre sujet et objet. Qu'il s'agisse de nos rapports l'autre en tant que corps-sujet, la temporalit ou aux objets du " got ", une socio-smiotique du sensible appelle bien plutt une conceptualisation de type interactif. D'o un ensemble de propositions thoriques nouvelles destines complter l'appareil conceptuel dj en place, et une srie d'analyses concrtes montrant (par exemple sur la scne politique, ou dans la publicit) comment le sens prouv nat d'ajustements rciproques et dynamiques, par " contagion " entre partenaires engags dans l'exprience vcue. |